mercredi 6 février 2008

Le pourquoi du comment...

Afin de mieux comprendre le choix de cette destination, voilà un "petit" résumé de la situation écologique locale.

Tout d'abord, pour faire rapide, le Kirgizistan est un petit pays (1/3 de la France) situé grosso-modo entre la Russie, la Chine, et l'Afghanistan, entre Europe, Asie et Moyen-Orient. C'est un pays très montagneux, certains pics culminent à plus de 7000m d'altitude (le Tibet n'est pas si loin).
- on y parle russe ou kirghize
- monnaie locale : le "som" (1€=50som)
- 2/3 des Kirghizes vivent dans la pauvreté


La région qui m'intéresse est située au sud-ouest du pays, tout près de la frontière ouzbèke : Mailuu-Suu, dans la vallée du Fergana (région la plus peuplée d'Asie centrale).

Cette région a été classée en 2006 dans les 10 zones les plus polluées de la planète.

Pour comprendre cette pollution, il faut revenir quelques années en arrière:
La ville de Mailuu-Suu est née en 1956 autour d'une mine d'uranium créée et exploitée depuis la seconde guerre mondiale (c'est notemment grâce à l'uranium extrait de cette vallée que l'URSS a pu se doter de la bombe atomique) .
En 1962, la mine ferme brutalement, et pour conserver l'activité ouvrière de la région, les soviétiques la remplace par des usines d'ampoules. Ces usines aujourd'hui fermées ont rejeté, durant des dizaines d'années, des tonnes d'ampoules défectueuses directement dans la vallée, formant ainsi de véritables montagnes de verre.

Depuis 2004, ces montagnes de verre sont prises d'assaut par des kirghizes qui récupèrent les filaments de nickel contenus dans les ampoules. Ce nickel est ensuite revendu en Chine grâce à un réseau plus ou moins mafieux (pour ne pas dire complètement...).
Il faut également savoir qu'à la place de ces montagnes de verre, il y avait initialement un ancien abattoir qui enterrait les animaux malades. Il arrive souvent que des travailleurs déterrent par mégarde des cadavres d'animaux, synonymes de foyer de maladies infectieuses (du type Anthrax).
Voici pour les montagnes de verre.

Seulement il n'y a pas que ça : il reste encore dans la région 23 sites de déchets d'uranium, et 10 sites de roches radioactives non-couvertes. A certains endroits, on trouve de l'uranium à moins de 70cm de profondeur. La radioactivité dans cette région oscille entre 60 et 150 micro-roentgen par heure, parfois beaucoup plus (pour info, le taux normal est de 17, et il est considéré comme dangereux pour la santé à partir de 60).
Les prairies et les rivières étant contaminées, les conséquences sur la population locale sont désastreuses :

- depuis 16 ans, 13% des femmes enceintes ont fait une fausse-couche
- 95% de ces fausses couches sont liées à des malformations du foetus
- 45% des enfants de Mailuu-Suu naissent avec une malformation du squelette
- 98% des enfants de l'école primaire de Koktach ont des problèmes de tyroïde

Pour finir, Mailuu-Suu est dans une zone à risque sismique élevé : un séisme suivi d'un éboulement de certains pans de montagne contaminerait la réserve d'eau de Syr Daria, qui dessert une grande partie de l'Asie centrale.


Bref, c'est assez compliqué, mais certains fonds commencent à se débloquer pour arranger tout ça (la banque mondiale a promis 12 millions de $ en 2003).


Pour ceux que ça intéresse voici le lien vers deux articles : l'un de Courrier International, l'autre de Terra Economica, et vers un reportage diffusé sur RFI.

2 commentaires:

Unknown a dit…

Moi, pauvre inculte... je viens de découvrir ce monde grâce à ton article...Ce monde qui paraît être d'une autre planète...

Unknown a dit…

Petit poème qui n'est pas de moi comme tu peux t'en douter.

(E.HARAUCOURT)

Partir c'est mourir un peu,
C'est mourir à ce que l'on aime :
On laisse un peu de soi-même
En toute heure et dans tous lieu.

C'est toujours le deuil d'un vœu,
Le dernier vers d'un poème ;
Partir, c'est mourir à ce que l'on aime.

Et l'on part et c'est un jeu
Et jusqu'à l'adieu suprême
C'est son âme que l'on sème,
Que l'on sème en chaque adieu :
Partir, c'est mourir un peu.